Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au macroscope 3
Vu au macroscope 3
  • Petite revue d'actualités sur des sujets divers: géopolitique, économie, santé etc.... Le titre est inspiré de l'ouvrage de Joël de Rosnay : "le macroscope - Vers une vision globale" - 1er février 1977 Une introduction à l'étude des systèmes complexes.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
26 février 2019

Les Gilets jaunes, un mouvement de restauration! - Yves Mamou

 

«Les Gilets jaunes ne sont pas une révolution mais un mouvement de restauration»

Par 
Publié le 04/12/2018    // le figaro

FIGAROVOX/TRIBUNE - Plusieurs commentateurs ont assimilé le mouvement des Gilets jaunes à la Révolution française. Pour Yves Mamou, cette révolte est, au contraire, tout l'inverse d'une révolution : issue de la base, elle s'oppose à la « révolution par le haut » des élites.

 


Yves Mamou est un ancien journaliste du Monde. Il a également collaboré au Canard Enchaîné, à Libération et à La Tribune. Collaborateur régulier du site américain The Gatestone Institute, il est l'auteur de nombreux ouvrages dont Hezbollah, dernier acte (éd. Plein jour, 2013) etLe Grand abandon. Les élites françaises et l'islamisme (éd. L'Artilleur), paru le 25 septembre 2018.


Les Gilets Jaunes n'ont pas de chef et la décentralisation est la marque de fabrique du mouvement. Quand des leaders naturels émergent, les Gilets Jaunes se mobilisent et les surveillent de près, menaces à l'appui s'il le faut. Le 30 novembre, l'un des deux Gilet Jaune qui avaient accepté de rencontrer Edouard Philippe à Matignon a aussitôt rompu le contact après le refus du Premier ministre que l'entretien soit filmé.

Cette obligation de rendre compte en temps réel est un signe. Le signe que la confiance qui est au fondement de la démocratie représentative ne joue plus. Un Gilet Jaune qui accepterait de négocier sans contrôle en temps réel serait aussitôt disqualifié. Ce n'est pas un hasard non plus, si les cahiers de doléances ont pour exigence régulière le droit au référendum d'initiative populaire.

Le peuple de France ne fait plus confiance à ses représentants. Ce que le baromètre de la Confiance que publie le Cevipof, le centre d'études politiques de Sciences-Po, confirme année après année. En janvier 2017, alors que François Hollande occupe encore l'Élysée, 70 % des personnes sondées par le Cevipof estimaient que la démocratie ne fonctionnait «pas très bien» ; 81 % éprouvaient des sentiments qui allaient de la méfiance à l'écœurement en passant par le dégoût vis-à-vis du personnel politique. En janvier 2018, le même baromètre révélait que 71 % des Français doutaient de la probité du personnel politique et que 69 % n'avaient confiance ni dans la droite, ni dans la gauche pour gouverner le pays.

Partis politiques et syndicats qui pourraient avoir un rôle d'intermédiation, paraissent hors-jeu.

Le soutien indéfectible - malgré les violences - que les Français apportent aux Gilets Jaunes marque une cassure franche et tangible entre les représentants élus - le pouvoir légal - et le peuple - le pouvoir légitime. Partis politiques et syndicats qui pourraient avoir un rôle d'intermédiation, paraissent hors-jeu. Bref, la situation a toutes les apparences d'une situation révolutionnaire.

Pourtant, la révolte des Gilets Jaunes n'est pas une révolution. Elle est même en réalité tout le contraire. Il s'agit d'un mouvement de restauration nationale, un mouvement de restauration de la démocratie et un rejet de la révolution, la vraie, celle que les élites politiques, économiques et administratives ont imposée trente années durant au peuple de France.

La mondialisation des économies, l'euro, Schengen, l'immigration musulmane…ont été les outils des partis politiques, gauche et droite confondus, pour révolutionner en profondeur la société française. L'ouverture des frontières - aux hommes comme aux marchandises, les délocalisations, la concurrence de la main-d'œuvre nationale par une main-d'œuvre importée… - n'a jamais donné lieu à un quelconque débat politique. Tous ces processus menés tambour battant ont abouti à la relégation d'une majorité du peuple de France dans des zones du territoire ou la seule existence possible est la survie. Les travaux du géographe Christophe Guilluy sur la France périphérique en attestent.

Oui, les Français ont, ces trente dernières années, été les victimes d'une révolution autoritaire menée sans débat ni consultation, une «révolution par le haut».

La révolte des Gilets Jaunes n'est pas une révolution. Elle est tout le contraire.

Aussi étrange que cela paraisse, les révolutions ne sont pas l'apanage du peuple qui envahit les rues, coupe des têtes et les porte au bout d'une pique. Les élites peuvent également décider de changer la société, quand celle-ci ne leur convient plus.

La place manque pour retracer comment l'euro, Schengen, la relative abolition des frontières ont été imposés de manière antidémocratique. Mais la très sensible question de l'immigration peut servir de repère. Une politique immigrationniste a été menée en France, sans débat démocratique.

Les magistrats non élus du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel ont joué un rôle clé dans cette révolution par le haut. Avis, requêtes, principes généraux du droit, questions prioritaires de constitutionnalité… ont chu en pluie depuis la fin des années 1970 pour autoriser le dévoiement du regroupement familial, la polygamie, le voile à l'école, la burqa, le droit d'émettre donné à Al Manar, la chaîne de télévision antisémite du Hezbollah, le droit au séjour des étrangers pour raisons médicales, le financement des cultes par les fonds publics, les sorties scolaires aux mères voilées, le burkini sur les plages, l'opposition au licenciement d'une salariée voilée à la crèche Baby Loup, le droit au voile islamique dans les écoles d'infirmières etc.

Des magistrats non élus ont décidé en leur âme et conscience qu'une société de citoyens fondée sur la séparation des Églises et de l'État devait céder la place à une société de communautés, et même de communautés religieuses.

"Gilets jaunes" : l'échec du macronisme ? - Regarder sur Figaro Live

Certes, le mouvement n'a pas été linéaire. Des inquiétudes sporadiques de l'opinion publique, ont sorti de temps à autre le législateur de sa torpeur. La burqa a été interdite et le licenciement de la salariée voilée de la crèche Baby Loup a fini par être autorisé. Il a néanmoins fallu quinze ans (1989-2004) pour interdire le voile islamique au collège. Aujourd'hui, la volonté d'Emmanuel Macron de signer le Pacte de l'ONU qui fait de la migration un droit de l'homme, la volonté de Bruxelles de relancer l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne par autorisation donnée aux citoyens turcs de voyager sans visa, le désir de la République en marche d'abandonner toujours plus de souveraineté à Bruxelles et la ferme intention de l'exécutif de balancer par-dessus les moulins la loi de 1905 sur la laïcité (ou ce qu'il en reste) sont les prochains clous sur le cercueil d'une France souveraine et la naissance d'un territoire sans identité et sans culture, devenu un espace de juxtapositions de communautés étrangères l'une à l'autre.

Une politique immigrationniste a été menée en France, sans débat démocratique.

On aura raison de me faire remarquer que la révolte des Gilets Jaunes ne dit rien de tout cela. Les Gilets Jaunes ne se plaignent pas de la société multiculturelle, ni de la fin de la planète, ils enragent seulement de ne plus boucler leurs fins de mois. Mais leur révolte fiscale bloque le financement de l'engrenage multiculturaliste et anti-laïque. Et leur méfiance vis-à-vis de la délégation de pouvoir enraye toute action politique d'envergure de l'État.

Les migrants finiront peut-être un jour par «payer nos retraites» comme le serinent Jacques Attali ou Alain Minc. Mais en attendant, la taxation à l'infini de la consommation des classes populaires paraît durablement enrayée.

La poule aux œufs d'or ne pouvant donner plus que ce qu'elle a, disent les Gilets Jaunes, rien ne sert de l'éventrer dans l'espoir d'en tirer davantage.

La nasse fiscale se referme donc sur la classe dirigeante. Sans hausse des impôts, la révolution par le haut (transition énergétique, migrations de masse…) ne pourra plus être financée. Et on imagine mal les gagnants de la mondialisation et les banlieues trouver légitime de passer à la caisse.

La machine folle de la révolution par le haut peut-elle être stoppée? Les semaines et les mois qui viennent nous le diront.

Publicité
Commentaires
Publicité
Newsletter
Archives
Pages
Publicité