Sebastian Roché n’interviendra plus à l’école des commissaires. Une sanction déguisée après ses prises de parole sur les GJ ?
Sebastian Roché n’interviendra plus à l’école des commissaires. Une sanction déguisée après ses prises de parole pendant la crise des Gilets jaunes ?
Quatre paragraphes et une formule de politesse ont scellé son sort. Un courrier, daté du 20 août, attendait lundi Sebastian Roché dans sa boîte aux lettres. À la lecture, le sociologue apprend que son contrat d'enseignement à l'École nationale supérieure de la police (l'école des commissaires) à Saint-Cyr-au-Mont-d'Or (Rhône) ne sera pas reconduit : « pour l'année universitaire 2019-2020, le cours […] ayant trait à l'analyse de la sécurité est confié à un autre intervenant ».
Spécialiste des rapports entre police et population, Roché était jusqu'à cette année en charge d'une quinzaine d'heures dans le cadre d'un Master 2 de droit privé, délivré par l'université Lyon III Jean-Moulin. La fin de sa collaboration est mise sur le compte d'une « refonte » des « contenus pédagogiques », « eu égard aux axes stratégiques de la police nationale ». Sebastian Roché intervenait devant les futurs commissaires depuis 1993.
Pendant la crise des Gilets jaunes, il s'est largement exprimé dans les médias pour mettre en garde contre la stratégie des forces de l'ordre qui, selon lui, occasionnait nombre de blessés. S'il reconnaît un savoir-faire, le chercheur sait se montrer critique. « Le ministère de l'Intérieur a été incapable de mettre en place une politique raisonnée de maintien de l'ordre », déclarait-il dans nos colonnes le 1er juin dernier. Des sorties médiatiques qui ont irrité le Syndicat des commissaires de la police nationale (majoritaire) avec lequel un bras de fer s'est engagé à travers les réseaux sociaux.
La police conteste toute sanction
La décision de ne pas renouveler les heures de cours de Sebastian Roché relève-t-elle d'une sanction déguisée après ses prises de parole ? L'intéressé n'a aucun doute. « Dans les moments de tension, le ministère de l'Intérieur se crispe. Il a tendance à confondre ce qui relève du débat public et du sabotage de la police », analyse-t-il. Son remplaçant n'est toujours pas nommé. Quant à l'enseignant qui assurait les cours avec lui, il est maintenu.
Sollicité sur le « cas Roché », la Direction générale de la police nationale conteste toute sanction, soulignant que « comme pour toute formation de haut niveau, les enseignements et les enseignants sont amenés à changer régulièrement et à évoluer au gré de leurs disponibilités et/ou des orientations pédagogiques retenues ».
Quelles que soient ses motivations, cette décision intervient alors que le chef de l'Etat opère une inflexion dans son discours. Après avoir rejeté la responsabilité des brutalités sur l'ensemble des manifestants - « lorsqu'on va dans des manifestations violentes, on est complice du pire »-, Emmanuel Macron reconnaît désormais que des dérapages ont pu avoir lieu dans les rangs des forces de l'ordre. « Comme président, je me dois aussi de regarder les blessures inacceptables qu'il y a eu durant ces semaines passées, les mutilations, du côté des forces de l'ordre, comme de nos concitoyens », a-t-il déclaré le 21 août, au détour d'une conférence de presse sur le G7.